Intelligence artificielle : mutations et nouveaux usages

Intelligence artificielle

« L’intelligence artificielle va profondément transformer notre société »

Consultant en intelligence artificielle à Chambéry

Romain Le Berrigot

La meilleure défense reste l’attaque. L’adage vaut dans nombre de contextes. Il est à nouveau pertinent à l’ère de l’intelligence artificielle. Il est du devoir du dirigeant d’instaurer une politique d’innovation, d’encourager l’audace et de penser l’avenir. Cela passe au préalable par une sensibilisation des équipes aux possibilités et aux limites de la technologie apprenante, et à la mise en place d’un contexte favorable à la créativité.

1 avril 2023

Haiclor Consulting

Intelligence artificielle

L’intelligence artificielle va profondément transformer notre société. Pour en discuter, nous avons posé quelques questions à Romain Le Berrigot, co-fondateur d’Haiclor Consulting, une agence de consulting en intelligence artificielle qui s’adresse aux entreprises et acteurs du territoire.

Bill Gates, le cofondateur de Microsoft, en est convaincu, et nous sommes nombreux à déjà lui donner raison : ChatGPT, et plus largement l’intelligence artificielle, est la plus grande révolution depuis l’émergence d’internet et du téléphone portable. Oui, nous sommes au cœur d’une réelle révolution technologique : une lame de fond, qui va avoir un impact durable sur notre économie. Romain Le Berrigot, co-fondateur d’Haiclor Consulting, nous en parle.

Au cœur d’une révolution technologique

Nous entendons parler d’intelligence artificielle à longueur de journée. Mais concrètement, en quoi est-ce une révolution ?
ChatGPT a permis au grand public de réellement rencontrer l’intelligence artificielle. Pour autant, je le constate autour de moi : si la vitesse d’adoption du chatbot a été impressionnante, beaucoup d’utilisateurs n’ont pas pris l’exacte mesure des usages possibles et du changement qui s’opère. Nous sommes au cœur d’une révolution technologique, et tout s’accélère depuis quelques mois. Cela va durablement impacter notre économie, mais également notre modèle de société, avec tout un ensemble de questions sous-jacentes qui se posent.

Lesquelles ?
Elles sont nombreuses et multi-dimensionnelles : à la fois économiques, éthiques, législatives, démocratiques, politiques et sociales. Je pense par exemple que nous ne pourrons pas contourner certaines questions fondamentales. Il faudra légiférer sur un grand nombre de sujets et trouver le juste équilibre : encadrer l’intelligence artificielle sans freiner son développement. Car on ne peut pas stopper ou freiner une innovation technologique : il faut plutôt réussir à l’accompagner, sans sur-réglementer inutilement ou préventivement.

Les questions que posent l’intelligence artificielle

Des exemples concrets ?
L’intelligence artificielle générative est une source de pouvoir, d’influence et de forte profitabilité qui, par définition, compte-tenu des fortes barrières à l’entrée, risque de profiter un nombre restreint d’acteurs. Peu d’entreprises vont avoir la main sur le cœur du réacteur. Même si certains signaux faibles peuvent remettre en question ce futur monopole. Il faut donc commencer dès à présent par se demander : comment faire pour garantir des intelligences artificielles neutres, et qu’est-ce que la neutralité ? Ce sont des questions quasi-philosophiques, mais elles sont déterminantes pour l’avenir de nos sociétés. Car l’intelligence artificielle va s’affirmer progressivement comme un outil clé dans nos prises de décision, pour les dirigeants comme pour les citoyens.

Tout va très vite.
Oui. Nous sommes clairement à un moment de bascule. On est dans une accélération significative des performances de l’intelligence artificielle. Mais surtout, elle se démocratise. Elle vient au contact des utilisateurs, comme vous et moi. Avant, elle était là, mais elle n’était pas perceptible. Désormais, elle n’est plus uniquement sous la couche du produit. On peut interagir avec l’intelligence artificielle. Cela devient palpable.

Elle était déjà là avant.
Bien sûr. L’intelligence artificielle était déjà présente dans notre quotidien. On la retrouvait notamment pour la reconnaissance vocale et visuelle, dans la finance, dans l’automobile. Un petit peu partout. Tesla, Google, EasyJet, La Société Générale, Youtube : elle est déjà exploitée depuis plusieurs années par bon nombre de grandes entreprises.

L’impact de l’intelligence artificielle sur l’emploi

Vous avez parlé de l’impact de l’intelligence artificielle sur notre modèle social. Qu’entendez-vous par là ?
L’intelligence artificielle va avoir un impact évident sur le marché du travail et sur la stabilité de nos sociétés. Il est complexe d’estimer avec précision son impact à moyen et long-terme, mais d’après une étude menée aux États-Unis par l’Université de Pennsylvanie et Open AI, 80% des emplois pourraient être affectés, dont 19% très fortement, et ce uniquement sur la base de GPT-4.

Voit-on déjà de premiers effets ?
Oui. Toujours de l’autre côté de l’Atlantique, un sondage réalisé par Resume Builder estime que 25% des entreprises ont déjà remplacé certains salariés par ChatGPT, et que 63% envisagent de le faire à l’avenir. Cela leur permet de gagner en productivité, mais ce n’est pas sans conséquence pour les salariés.

Peut-on craindre un chômage de masse ?
À chaque fois qu’une technologie majeure apparaît, de façon quasi-unanime, on pense qu’un grand nombre de métiers vont disparaître et que l’emploi va se raréfier. Finalement, ça ne se produit jamais. Certains disparaissent, mais d’autres se créent. En tout cas, jusqu’à présent. Comme le dit très bien Gilles Babinet, nous allons plutôt assister à un glissement des métiers. Nous allons travailler différemment, et beaucoup de professionnels devront repenser leur approche pour continuer à apporter de la valeur ajoutée à leurs clients. C’est en tout cas mon hypothèse forte.

Vers une mutation profonde de la société

Pas d’inquiétude à avoir donc.
À court-terme, j’ai quand même de sérieuses inquiétudes, car la vitesse de propagation de l’intelligence artificielle générative est exceptionnellement rapide. Je crains que nous vivions une période de transition complexe et instable, surtout dans un pays comme la France, où le tertiaire, le plus impacté à court-terme par cette évolution technologique, représente 77% des emplois. C’est pour cette raison que le corps politique doit absolument se saisir du sujet dès à présent.

Que peut-il faire ?
Nous n’avons pas intérêt à freiner le développement de l’intelligence artificielle. Au contraire. Ce serait une erreur fondamentale, et ça nous mettrait hors-jeu par rapport à des grandes puissances comme les États-Unis et la Chine, qui sont déjà en avance sur ces sujets. Il vaut mieux être proactif. La clé, c’est de permettre aux salariés de se former pour qu’ils puissent tirer profit de l’intelligence artificielle et gagner en productivité. C’est d’ailleurs la raison d’être d’Haiclor Consulting : permettre aux entreprises des territoires d’adopter l’intelligence artificielle et de faire monter en compétences leurs collaborateurs.

Réagir en tant qu’entrepreneur

Comment doit réagir un chef d’entreprise face à l’intelligence artificielle ?
Périr ou muter. C’est un livre de Denis Marquet et d’Edouard Rencker que j’avais lu, à l’époque où je rédigeais un mémoire sur la disruption numérique. Nous sommes exactement dans cette situation. Nous devons accepter l’évolution technologique et nous adapter. Il faut accepter de se remettre en question. Cela peut pousser certaines entreprises à pivoter, quand leur business model est directement exposé aux mutations de marché. D’autres vont sensibiliser et former leurs collaborateurs pour réussir à gagner en productivité. Dans tous les cas, faire abstraction de l’intelligence artificielle serait une erreur. Il faut absolument se saisir du sujet. C’est vital.

Et la jeunesse, dans tout ça ?
Il faut absolument intégrer l’intelligence artificielle au cœur des programmes pour sensibiliser les nouvelles générations sur le sujet. C’est essentiel pour leur avenir. Nous entrons dans un monde où le sens critique, la créativité et l’intelligence émotionnelle sont clés. Pour moi, il faut donc changer de paradigme, et repenser totalement le rôle de l’école. C’est un chantier titanesque. Les professeurs ne doivent plus enseigner, mais apprendre à leurs élèves à apprendre. Faire en sorte d’avoir des jeunes curieux, agiles et capables de s’adapter aux grandes mutations technologiques. Leurs méthodes vont devoir évoluer.

IA : un danger pour la démocratie ?

L’intelligence artificielle pose-t-elle des problématiques démocratiques ?
Oui. Là encore, cela pose un ensemble de questions. Comment s’assurer que les intelligences artificielles conservent une objective et n’influence pas l’opinion publique ? Comment se prémunir face à la recrudescence des fake news et des nouvelles formes de manipulation ? Ce sont de vrais sujets. À cela se greffe une autre problématique : la reproduction des biais et des discriminations.

Peut-elle nuire au débat public ?
Complètement. Je prends un exemple concret. Nous sommes un certain nombre, à des fins expérimentales et pour sensibiliser le grand public, à avoir généré des visuels très réalistes d’Emmanuel Macron à partir de l’intelligence artificielle MidJourney. Les résultats sont souvent bluffants. Nous pouvons créer des scènes surréalistes. Cela pose une vraie question. Car nous pouvons très facilement imaginer des récits et travestir la réalité. Une personne mal intentionnée peut très bien les utiliser à mauvais escient. Donc oui, cela peut nuire au débat public et même être à la source de vives tensions. Sans compter que la démocratisation des intelligences artificielles qui permettent de créer des deep fakes ne vont rien arranger.

L’intelligence artificielle et les fake-news

Que faudrait-il mettre en place pour lutter contre ça ?
D’abord, sensibiliser les citoyens. Faire en sorte qu’ils soient vigilants au quotidien et qu’ils prennent du recul sur les informations qu’ils reçoivent. Après, sur le plan législatif, sans définir une réglementation irrespirable, je pense qu’il pourrait être judicieux de restreindre la possibilité de créer des visuels ultraréalistes de personnalités publiques, sans pour autant contraindre l’acte de caricature. Mais là encore, comment caractérise-t-on légalement la notion de personnalité publique ?

Bref, énormément de questions auxquelles il faudra répondre.
Oui. Et encore, nous n’avons abordé que la surface de l’iceberg. C’est un sujet dont nous pourrions discuter pendant des heures entières. Les opportunités et les problématiques qu’elles soulèvent sont immenses. C’est à ça que l’on reconnaît une véritable révolution technologique : elle change le monde.

Vous voulez poursuivre la discussion ?

Romain Le Berrigot est le cofondateur d’Haiclor, une agence de consulting spécialisée en intelligence artificielle. Son objectif : permettre aux entreprises des territoires, quelle que soit leur taille, d’adopter et de mettre à profit cette innovation. Passionné par le sujet, il est à votre disposition pour répondre à vos questions et esquisser les contours d’une future collaboration.

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Comprendre, adopter et utiliser l’intelligence artificielle. Nous sommes là pour rendre le sujet intelligible. Pour permettre aux entrepreneurs, aux dirigeants et aux citoyens de s’approprier cette révolutions technologiques, d’appréhender ses impacts et d’adapter leur approche.

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