Intelligence artificielle, création et droit d'auteur

Intelligence artificielle

Intelligence artificielle : quid des responsabilités et du droit d’auteur ?

Consultant en intelligence artificielle à Chambéry

Romain Le Berrigot

La meilleure défense reste l’attaque. L’adage vaut dans nombre de contextes. Il est à nouveau pertinent à l’ère de l’intelligence artificielle. Il est du devoir du dirigeant d’instaurer une politique d’innovation, d’encourager l’audace et de penser l’avenir. Cela passe au préalable par une sensibilisation des équipes aux possibilités et aux limites de la technologie apprenante, et à la mise en place d’un contexte favorable à la créativité.

1 avril 2023

Haiclor Consulting

Intelligence artificielle

ChatGPT, MidJourney, Dall-E : ces nouveaux outils, à disposition du plus grand monde, met sur la table une question inédite qu’aucun entrepreneur ou créateur ne s’était posée jusqu’à peu : qui est l’auteur et le responsable des productions réalisées à partir de l’intelligence artificielle ?

C’est un sujet épineux. Certaines réponses existent, d’autres restent à écrire. Car comme toujours, la technologie est en avance sur la législation. Nous arrivons ainsi à un tournant, avec une accélération de la course déjà frénétique à l’intelligence artificielle.

Son adoption est massive, et les défis sont multiples, avec des zones de flou, notamment en matière de responsabilité et de copyright. Il va donc falloir adapter notre cadre législatif pour permettre aux entreprises et aux citoyens d’avancer plus sereinement. Mais qu’en est-il aujourd’hui, à l’heure où nous écrivons ces quelques lignes ?

Droit d’auteur : les questions que posent l’intelligence artificielle

Je vais parler deux minutes de moi, dirigeant d’une agence de communication, et désormais cofondateur de cette agence consulting en intelligence artificielle. J’ai d’abord commencé à étudier les limites de ChatGPT, dès sa sortie, pour comprendre les usages possibles, notamment d’un point de vue rédactionnel, mais également les faiblesses de l’outil. Puis je me suis demandé : qui est l’auteur du texte, si je décide de reprendre l’intégralité d’un écrit généré par l’intelligence artificielle ?

La même question est apparue quelques jours plus tard, quand j’ai commencé à sérieusement utiliser l’outil MidJourney, qui permet de générer des visuels impressionnants à partir d’un simple prompt. Il suffit d’un peu d’imagination et d’une capacité à formaliser ses idées pour donner vie à des créations originales, dans le style de votre artiste favori. Nous pouvons ainsi, par exemple, imaginer la Joconde de Léonard de Vinci peinte par Jackson Pollock, Kehinde Wiley ou Keith Haring.

Alors, qui en est l’auteur ? Vous, ou le créateur de l’intelligence artificielle ? Et que devons-nous à l’artiste à qui nous avons emprunté le style ? Tant de questions qui, jusqu’ici, n’avaient leur place que dans les bons films de science-fiction et qui viennent aujourd’hui percuter notre réalité. Par définition, cela remet entièrement en cause notre interprétation du droit existant.

Qui est responsable devant la loi en cas d’infraction ?

De même en matière de responsabilité. Si l’intelligence artificielle génère un visuel diffamant et trompeur, avec des répercussions pour une personnalité politique, qui doit en être tenu responsable devant la justice ? Par exemple, j’en ai fait moi-même l’expérience : il est tout à fait possible, avec MidJourney, de simuler la présence d’Emmanuel Macron au cœur d’une manifestation contre lui-même. Quid si nous créons délibérément un faux récrit engendrant des conséquences géopolitiques ? De manière préventive, les créateurs d’intelligence artificielle ont déjà pris des dispositions : il est désormais impossible, sur MidJourney, de générer de fabriquer une image de Xi Jinping.

Et nous pourrions aller encore plus loin, avec l’intelligence artificielle qui se développe également dans le domaine médical. D’ailleurs, Jean-Emmanuel Bibault, dans son excellent ouvrage « 2041 : l’odyssée de la médecine », démontre comment l’IA bouleverse le milieu de la santé. Quid de la responsabilité en cas de mauvaise prédiction et d’un diagnostic erroné ?

On pourrait déjà faire le parallèle avec la voiture autonome. En France, en l’état actuel des choses, et par conséquent sur la base d’un décret de 2021, la responsabilité pénale du conducteur ne peut être engagée en cas d’accident ou d’infraction au code de la route lorsque le mode autonome est activé. C’est désormais l’opérateur du système qui endosse la responsabilité.

Il va donc falloir éclaircir tous ces points rapidement pour établir les responsabilités à attribuer à chacun : les créateurs d’intelligence artificielle, les exploitants et les utilisateurs finaux. C’est la clé pour libérer ces innovations et traduire les risques.

Datamining : des artistes attaquent les créateurs d’intelligence artificielle

En tout cas, sur le droit d’auteur, la bataille a déjà commencé. En janvier 2023, trois artistes, ainsi que la banque d’images Getty, ont par exemple porté plainte contre plusieurs entreprises de pointe. Ils leur reprochent notamment d’avoir collecté, exploité et analysé des milliards de textes et d’images non-libres de droit pour développer et nourrir leur modèle d’intelligence artificielle. C’est ce que l’on appelle le datamining. Pour autant, d’après les dispositions en vigueur, cette pratique est autorisée, sous certaines conditions, en Europe et aux États-Unis.

Qui est l’auteur d’une œuvre produite par l’intelligence artificielle ?

Le flou réside davantage, à notre goût, au niveau des droits d’auteur sur les visuels créés à partir de l’intelligence artificielle. Mais là encore, la législation en vigueur donne déjà de premiers indices. D’abord, sur les droits que peut faire valoir l’artiste à qui nous avons emprunté le style. Coucou Kehinde Wiley, on adore ton travail ! Réponse : rien. Et oui, une idée ou un style ne peut être protégé, ce qui semble balayer d’un revers de main l’une de nos appréhensions, à condition bien entendu que notre visuel ne réinterprète pas de trop près une œuvre originale.

Maintenant, qui en est l’auteur ?

Au niveau du copyright, un certain nombre de juristes estiment qu’une intelligence artificielle « n’est ni propriétaire, ni auteur, ni responsable ». En revanche, peut-on accorder les droits de propriété intellectuelle à la personne à l’origine du prompt ?

Aux Etats-Unis, le Copyright Office a tranché récemment : c’est non. En tout cas, pour le moment. Car une production réalisée par un algorithme ne peut pas être, d’après les premiers rendus de justice, considérée comme une œuvre originale. Alors faut-il créer un droit spécifique, plus adapté au processus de création du monde de demain ? D’après nous, oui.

L’intelligence artificielle : un défi pour nos parlementaires

C’est un travail de fond que nos parlementaires vont devoir effectuer. Il va falloir trouver un juste équilibre pour réguler l’intelligence artificielle sans pour autant la brider. Mais le développement de cette technologie peut se faire uniquement avec un cadre législatif clair, qui permet à chacun et à chacune de comprendre parfaitement ses droits et ses devoirs. Car pour pouvoir respecter la loi, encore faut-il qu’elle se soit adaptée à l’évolution de notre société.

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